Quelque part dans l'esprit du très récent (et très bon) «Sing Sing», où le théâtre venait élever et "libérer" des âmes emprisonnées, ce premier long-métrage co-réalisé par le couple Kelly O'Sullivan-Alex Thompson, s'avère être mon coup de cœur de ce début de mois de mai.
L'histoire d'une famille (Dan, Daisy et leur fille Sharon) qui ne semble plus pouvoir communiquer qu'à travers la colère et le conflit.
L'histoire d'un père, portant un profond mal-être en lui, et qui va intégrer totalement par hasard une petite troupe de théâtre amateur.
Et dans cet espace de création et d'échanges où l'on ne juge personne et où ce qui compte est la vérité de ces mots et de ces émotions que l'on a pas besoin de cacher comme nous le demande la société, une pièce va se monter : «Roméo et Juliette».
Une tragédie dont le sujet (et en particulier le dénouement) résonne directement chez Dan, le renvoyant à la propre tragédie qu'est en train de traverser sa famille depuis plusieurs mois et dont ils n'arrivent pas à faire le deuil.
Évitant le piège facile du film misérabiliste, «Ghostlight» est au contraire une œuvre emplie de bienveillance et de sincérité.
Un voyage théâtral et émotionnel qui va permettre à une famille de se reconnecter et de se reconstruire.
Une famille à l'écran interprétée par une famille à la ville (Keith Kupferer, Tara Mallen et leur fille Katherine Mallen Kupferer), ce qui contribue d'autant plus à la vérité de leurs interactions.
Un casting talentueux et attachant, auquel on croit et dans lequel on peut se projeter, parce que leurs mots et leurs émotions sont palpables à l’écran et nous parviennent jusque dans la salle.
Une histoire s'ouvrant comme une pièce de théâtre, et dans laquelle la scène devient un exutoire menant à la résilience, un moyen de redonner de l'espoir à des êtres écrasés par les douleurs de la vie.
En partageant pour la première fois la scène avec sa fille (qui avait délaissé les feux des projecteurs suite à ce même drame), en se défaisant de sa propre histoire et en parvenant enfin à mettre des mots sur sa souf, Dan va pouvoir se réconcilier avec lui-même et se sortir de ce chagrin et de cette solitude qui l'habitaient.
En acceptant le rôle de Roméo et en allant au bout de son histoire d'amour tragique avec Juliette, il va parvenir à mettre en lumière ce fantôme intime, se reconnecter à lui à travers les mots du jeune Montaigu pour mieux lui (et se) pardonner, et enfin parvenir à lâcher prise.
Mourir (pour de faux) pour revivre (pour de vrai).
Plein de délicatesse et de pudeur, ce film nous prouve que les œuvres les plus "simples" sont parfois les plus authentiques et nous touchent en plein cœur.
Une petite pépite d'humanité que je ne peux que vous inviter à découvrir au plus vite en salle.
Et encore un très beau film qui aurait mérité bien plus de visibilité. 8-8,5/10.