Vingt Dieux
7.2
Vingt Dieux

Film de Louise Courvoisier (2024)

A gros sabots dans le Jura

Quel magnifique exemple de bienveillance mâtinée de condescendance que celui donné par la critique "parisienne" dans la portée aux nues de ce film ! Sur la foi de plusieurs articles élogieux, je me faisais une joie d'assister à une projection dont le sujet sortait des sentiers battus. Ma déception est à la hauteur de mon enthousiasme initial et elle n'est sans doute rien comparée à celle de "gens de la terre" de ma commune gersoise venus pour l'occasion dans une salle qu'ils ne fréquentent que très exceptionnellement, trompés comme ils l'ont été sur la marchandise.

Ceux qui ont cru à une nouvelle version du remarquable "Petit paysan" en auront été pour leurs frais, tout comme dans un tout autre registre ceux qui espéraient trouver un ton proche de celui du non moins excellent "Chien de la casse", avec lequel certains papiers signalaient des accointances.

Le ton est donné dès le début avec une lourde scène de fête censée planter le décor dans lequel évolue le jeune Totone ... Je ne connais rien de la jeunesse rurale du Jura mais je doute qu'elle se retrouve dans cette image de Totone qui se livre à un strip-tease des plus raffinés avec pour fond sonore le beuglement de fêtards plus ou moins avinés. Aviné au point de s'écrouler, c'est le père que Totone soutient jusqu'à sa voiture et qu'il installe au volant, apparemment moins conscient de ce qui va s'ensuivre que le spectateur.

C'est en chaussant ainsi ses gros sabots que la réalisatrice fait de Totone à 18 ans le seul responsable à la fois de la ferme familiale et de sa petite soeur de 7 ans, sans que jamais n'apparaisse l'ombre d'un soutien si ce n'est celui de potes pas plus matures que lui. L'histoire du fromage qui a dû drainer un public au plus près des travaux de la terre n'est finalement qu'anecdotique et ne sert que de toile de fond au prétendu portrait d'une jeunesse rurale on ne peut plus caricaturale. A la fin du film, l'interminable scène d'une sorte de stock-car vient confirmer dans le scénario cette absence de finesse que n'a semble-t-il pas perçue la quasi totalité d'une presse à la dent pourtant habituellement dure, à l'exemple des inénarrables critiques des Cahiers du Cinéma ou des "Inrocks".


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le 30 déc. 2024

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jmlaffont

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