Mon libraire m'a beaucoup chanté les louanges de cette BD, qui explore le transhumanisme sous un jour plus humain. Deux personnes âgées, l'un héritier d'un créateur d'une franchise de comics, l'autre femme scientifique, se sentant sur le déclin, acceptent de participer à un programme visant à augmenter leurs capacités. Néanmoins, cela e par le age de l'âme dans une sorte d'embryon qui se développe (sorte de potatoe-head anxiogène). Mais voilà tout le hic de l'opération : on ne parvient pas encore à faire se développer le nouveau corps de façon esthétiquement convenable, ni à le faire survivre sans l'ancienne membrane de vieux corps décrépi. Il semblerait donc qu'il faille conclure que deux âmes identiques ne peuvent que coexister, et que le départ de l'une signe l'arrêt de mort de l'autre.
A la croisée entre Frankenstein, la Mouche et Gattaca, cette problématique riche et profonde est développée avec émotion et justesse pendant quasiment toute la durée de l'album. Et par endroit, on sent un potentiel horrifique puissant dans ces ersatz humains, qui est à mon goût un peu sous exploité. Les enjeux scientifico-éthiques de ce progrès scientifique sont parfois un rien abscons dans leur formulation verbale, et perdent un peu de leur splendeur qui aurait pu se contenter d'être visuelle et narrative plutôt que descriptive et brouillonne.
Toutefois, la bienveillance qui, selon la préface d'Aronofsky, ferait la force du livre, est pour moi le prétexte d'une fin un peu insipide, qui ne se montre pas nécessairement à la hauteur du principe directeur d'une oeuvre qui reste toutefois aussi intéressante qu'émouvante.