The Acolyte
4.9
The Acolyte

Série Disney+ (2024)

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Quand l'audace ne suffit pas à ranimer la Force




L'heure est venue d'affronter le é.



Entre ambitions et maladresses




The Acolyte est une série en huit épisodes qui dès son bandeau narratif d’introduction démarre sur une note prometteuse. Le récit nous transporte cent ans avant l'arrivée des Skywalker, à une époque encore méconnue de l’histoire des Jedi sur grand et petit écran. Un siècle où les Jedi sont au sommet de leur puissance, si bien, qu'ils commencent pourtant à s’égarer lentement. Le fil rouge autour du titre "The Acolyte" est introduit par une scène étrange qui m'a fait sourire, où un mystérieux antagoniste Sith explique vouloir un "acolyte", au lieu de simplement dire apprenti ou padawan. Un mot prononcé bizarrement autour d'un monologue de grand méchant qui l'est tout autant, mais qui heureusement pose les jalons d’une intrigue bien sombre. Dès la scène d'ouverture, le ton est donné avec une confrontation percutante entre une mystérieuse guerrière aux allures d'assassin et la vénérable Jedi Indara (Carrie-Anne Moss), qui se solde par la mort de cette dernière. L'identité de l'assassin est rapidement révélée. Il s'agit de Mae (Amandla Stenberg), une jeune femme ayant un if avec l'ordre de la Force, formée par un maître de l’ombre Sith, chargée d’éliminer quatre Jedi bien précis pour prouver sa valeur. À partir de là, tout s’enchaîne rapidement. Le puissant maître Jedi Sol (Lee Jung-jae) est envoyé, accompagné de sa padawan et d’autres Jedi, pour enquêter sur cet assassin mystérieux. Très vite, les soupçons se portent sur Osha, l’ancienne padawan de Sol, et qui n’est autre que la sœur jumelle de Mae, supposée morte depuis longtemps. Si la série parvient à capter rapidement l'attention en ouvrent quelques pistes scénaristiques intrigantes, il faut reconnaître que l’on perçoit assez tôt la direction que l’intrigue entend suivre, laissant craindre un déroulement trop balisé et sans véritable surprise.



À travers un scénario coécrit par une multitude de mains, comme la cinéaste principale de ce projet Leslye Headland, appuyée à l'écriture par Charmaine DeGrate, Jason Micallef, Kor Adana, Jasmyne Flournoy, Jocelyn Bioh, Claire Kiechel, Jen Richards, Eileen Shim et Cameron Squires, plusieurs cheminement se dessinent dès les deux premiers épisodes, qui offrent une introduction plutôt solide à ce nouveau périple dans l’univers Star Wars. On y découvre le é mystérieux de Mae et Osha, marqué par un incendie tragique ayant décimé leur famille. Le récit nous laisse comprendre que Mae serait responsable de cette catastrophe et que les Jedi auraient recueilli la dernière survivante, Osha, pour l’intégrer parmi eux. Toutefois, très rapidement, quelque chose semble clocher, notamment lors du second épisode, au cours du combat entre Mae et Maître Torbin (Dean-Charles Chapman), l'un des quatre fameux Jedi à éliminer. Plongé en transe depuis une décennie, ce Jedi offre une scène d'action visuellement réussie face à Mae, jusqu’au moment où il se réveille, et s’excuse directement auprès de son assassin, avouant s’être muré dans cette transe par culpabilité, puis se suicide dans la foulée. Un traitement aussi lourd laisse peu de doute, voir aucun, sur la suite. Il devient évident que les quatre Jedi liés à cette affaire portent une responsabilité bien plus grave qu'ils ne le laissent entendre, et qu'ils pourraient être directement impliqués dans cette terrible tragédie. Cette inversion morale, où ceux censés incarner la lumière pourraient être les véritables bourreaux, est clairement audacieuse. Malheureusement, la série emprunte une voie tellement prévisible que l’on devine les développements majeurs bien avant leur révélation, si bien que nous sommes nullement surpris lors de la révélation de ceux-ci. Qu’il s’agisse de l’échange de rôles entre Mae et Osha, qui rappelle maladroitement certaines théories de fans autour de la postlogie, mais avec encore moins de subtilité, ou du "twist" concernant l’identité du mystérieux maître Sith, si évident qu'il en devient presque comique lorsqu’il est enfin révélé, The Acolyte manque cruellement de surprise, alors que pourtant, il a de nombreuses révélations à faire.


Malgré tout, nous sommes face à un véritable bol d’air frais qui fait du bien à suivre, qui va dévoiler toute son originalité lors de l’épisode 3 avec l’introduction de l’Ordre des Sorcières, qui insuffle de vraies idées neuves dans l’univers de Star Wars. Voir émerger un groupe maîtrisant la Force sans être ni Sith ni Jedi est franchement ionnant, et j’adhère totalement à cette approche. Bon, leur nom, "l’Ordre des Sorcières", est vraiment peu inspiré, mais soit. Ce groupe exclusivement féminin a des allures d’Amazones de la Force, ce qui n’est pas pour me déplaire, même si l’ambiance évoque parfois davantage Dune et ses guerrières fremen, mais bon… Très vite, néanmoins, on découvre que cet Ordre est victime d'un système oppressif parce qu'il utilise la Force d'une manière différente, jusque là c'est parfait, mais aussi parce qu’il est composé de femmes. À ce stade, on sent qu'on commence à s’éloigner du cœur de Star Wars pour faire écho à des thématiques politiques bien actuelles. Mais, là encore, je peux l’accepter, car on peut tout à fait transmettre des messages dans une œuvre de ce type, même si je ne suis pas dupe, car il est clair que Leslye Headland est davantage portée par son discours militant que par la mythologie Star Wars. Ses prises de parole publiques manquant cruellement de subtilité, c’est aussi ce qui fait que je n’apprécie pas particulièrement cette cinéaste. Cela dit, tant que ces messages restent bien intégrés au récit, je n’ai aucun problème avec leur présence. Même si, honnêtement, je me moque éperdument de savoir qui couche avec qui. Avec un peu plus de finesse et moins de lourdeur dans l’écriture, car encore une fois, la subtilité n’est pas le fort de Leslye Headland, l’ensemble aurait pu être encore meilleur. Mais jusqu’ici, je dois reconnaître que je prends plaisir à découvrir cet Ordre des Sorcières et que, malgré quelques réserves, j’apprécie ce qui est proposé.



Les Jedi justifient de dominer la galaxie au nom de la paix. Mais cette paix, est un leurre.


Finalement, un point de rupture majeur surgit avec la révélation que Mae et Osha seraient toutes deux nées de la Force elle-même via l'Ordre des Sorcières. Ce choix est profondément problématique. Anakin Skywalker, enfant de la prophétie destiné à rétablir l'équilibre, était censé être unique. Le seul à être né de la Force. L'élu. Lui retirer cette exclusivité, après que la postlogie a déjà sabordé le poids de son sacrifice en ressuscitant Palpatine, revient à affaiblir encore davantage l’héritage de Dark Vador. Cette décision scénaristique ne trahit pas seulement l'esprit de la saga, elle révèle surtout une incompréhension inquiétante de ce qui donnait toute sa force symbolique à l’histoire d’Anakin. À cela viennent s’ajouter d’autres fautes, comme l'idée qu’un sabre laser change désormais de couleur en fonction des émotions, traduisant un age du côté lumineux vers le côté obscur. Là encore, une incohérence saute aux yeux. Pourquoi le sabre d’Anakin n’a-t-il jamais changé de couleur lorsqu’il est devenu Dark Vador ? Décidément, Disney semble peu soucieux de respecter ce personnage ô combien indispensable à cette saga. Des erreurs à mettre sur le dos de Kathleen Kennedy, et l'équipe qui l'accompagne, qui doit s'assurer que ce genre d'incohérences n'ont pas lieu. On peut aussi reprocher à la série certaines facilités scénaristiques, comme l'absence d'explication sur la capacité du casque et du gantelet du Sith à briser un sabre laser. Il faut avoir lu les comics pour le comprendre ; pour les autres spectateurs, tant pis, et c’est franchement regrettable. Tout cela illustre une écriture manquant cruellement de subtilité, malgré quelques bonnes idées çà et là. Narrativement, la série montre parfois des éclairs d’audace en tentant de déconstruire les idéaux Jedi et en explorant des zones plus moralement grises. Mais ce projet ambitieux est desservi par des retournements prévisibles, des motivations trop souvent survolées, et une volonté de choquer qui prend le pas sur une construction patiente et cohérente du récit.



Et pourtant, malgré ces lourdes erreurs, la série parvient à captiver, notamment en ramenant quelque chose que je n'espérais plus revoir, à savoir des duels au sabre laser intenses et percutants, avec une action portant enfin une véritable charge émotionnelle. Un point perdu depuis la fin de la prélogie, brièvement revenu lors de la série Ashoka, mais qui ici signe son grand retour, et ce permet même d'apporter de l'originalité. Les combats sont réussis. La mise en scène autour des duels est nerveuse. Un sabre à la main, certains personnages parviennent à sortir du lot de manière positive. C’est notamment le cas de Jecki (Dafne Keen), la jeune Padawan de Sol, qui livre un beau duel contre le seigneur Sith. Sa disparition brutale, lors d’un affrontement particulièrement spectaculaire, laisse un véritable vide, preuve que la série sait, par instants, viser juste. Le reste des affrontements est tout aussi prenant, avec de nombreux corps-à-corps et croisements de sabres lasers qui font plaisir à voir. Visuellement, la série affiche une certaine ambition, avec quelques très beaux plans que l'ont doit à la photographie de Chris Teague et James Friend. Les décors naturels, issus de l’île de Madère et du Pays de Galles avec ces quelques rares structures architecturaux de Rob Cameron, même s'ils sont agréables, ne sont en réalité que de grands espaces verts vides . Au moins, cela change des éternels déserts vides de la saga : ici, c’est vide… mais c’est vert. Les costumes de Jennifer L. Bryan bénéficient d’un réel soin, apportant de la texture à l'univers. En revanche, côté maquillage, difficile de ne pas tiquer sur certains personnages, on voit trop nettement qu’il s'agit d'un simple fard appliqué à la va-vite, notamment sur Vernestra (Rebecca Henderson). Pour le reste, je préfère voir des monstres en animatronique ou fait de maquillage, plutôt qu'un abus de CGI. Quant au casting dans son ensemble, il laisse une impression mitigée. Autant il y a des personnages marquants campés par des comédiens qui font le travail comme Carrie-Anne Moss, Lee Jung-jae et Dafne Keen, autant il y en a qui sont trop lisses, et surtout trop "adolescents", peinant à incarner l'autorité et la gravité qu’on attendrait de Jedi au sommet de leur puissance comme Charlie Barnett… ou d’une menace Sith surgissant des ténèbres pour le compte du côté obscur de la Force avec Manny Jacinto. De plus, la dynamique entre Mae et Osha, toutes deux incarnées par Amandla Stenberg, devient vite répétitive et finit par lasser. Enfin, la composition musicale de Michael Abels s’avère globalement oubliable, avec en particulier des musiques de générique de fin qui ne collent absolument pas à l’esprit Star Wars.



Beaucoup d’éléments sombres viennent ternir les aspects positifs, mais pas au point, selon moi, de faire de The Acolyte une série catastrophique à jeter aux oubliettes. C’est une première proposition, certes imparfaite, mais qui aurait pu s'améliorer au fil des saisons. Elle laissait entrevoir la possibilité d'ouvrir la voie à quelque chose de plus ambitieux, notamment avec l'arrivée potentielle d'un antagoniste longtemps fantasmé, Dark Plagueis. J’avoue que revoir encore et toujours cette dualité entre Mae et Osha aurait fini par sérieusement m’agacer, mais malgré cela, suivre l’Ordre Jedi à son apogée à travers d’autres personnages restait un vrai plaisir, et il y avait encore tant à explorer. Au moins, la série ne laisse pas place à l’ennui, elle avance, portée par une intrigue parfois simpliste, mais qui offre son lot d’action, de questionnements et de drame. Voir naître un autre pan de l’univers Star Wars était une promesse que j’aurais aimé voir se poursuivre, mais il semble que cela n’ira pas plus loin, du moins pas avec ces personnages. La faute en revient-elle nécessairement au public ? Non, clairement pas. La véritable responsabilité incombe aux discours problématiques de Leslye Headland, Kathleen Kennedy et Bob Iger, qui ont préféré jouer la carte de la provocation plutôt que de célébrer la création d'un nouvel univers Star Wars. Résultat, quand le public a commencé à se détourner, il s’est fait insulter en plein lancement de la série. Franchement, ce n'était pas très malin.



CONCLUSION :


The Acolyte oscille entre audace et maladresse. Le potentiel est réel, notamment dans la mise en scène et certaines idées de fond. Mais certaines lourdeurs scénaristiques, et certaines idées mal intégrées dans la mythologie fondamentale de Star Wars, empêchent la série de réellement décoller dans les étoiles. Néanmoins, il reste une proposition au minimum divertissante, parvenant à remettre en avant la puissance des Jedi et le génie des affrontements au sabre laser, le tout à une nouvelle époque de la Force.


Pas facile de renouveler un mythe sans en dénaturer les fondations, mais à chacun son boulot.



Fermez les yeux. Vos yeux… peuvent vous tromper. Ne vous y fiez pas.

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le 28 avr. 2025

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