Sambre est une adaptation de l’enquête d’Alice Giraud, Sambre : Radioscopie d'un fait divers, qui s’inspire de l’affaire du violeur de la Sambre.
La mini-série de six épisodes, axe chacun d’eux sur un personnage, qui ont leur importance dans l’affaire et se décompose de cette manière :
Premier épisode : la victime
Second épisode : la juge
Troisième épisode : la maire
Quatrième épisode : la scientifique
Cinquième épisode : Le commandant
Sixième épisode : Le violeur
L'affaire se déroule entre 1988 et 2018 dans les Hauts de . La Sambre est une rivière qui traverse les lieux des crimes. L’enquête ne prend vraiment forme qu’au bout de huit ans. Elle s'étale sur plusieurs années et va déborder sur le territoire de la Belgique.
Le premier épisode présente la victime, Christine (Alix Poisson). Après son agression, elle se retrouve confrontée à la police avec son capitaine (Pasquale d’Inca) dénué d’empathie, ne prenant pas en compte sa détresse et douleur, lui faisant revivre ce moment pour finir par lui dire “vous avez eu de la chance”. Puis, face à son mari qui est aussi dans l’incapacité de la comprendre, ne pense qu’à lui-même et à ses besoins, à savoir le sexe. Christine est seule face à ce drame.
Les répercussions psychologiques de l’agression vont se faire ressentir par petites touches. Un geste la fait basculer dans une peur irrationnelle, ainsi qu’un bruit, une odeur ou d'autres signes susceptibles de la ramener à revivre ce moment, que personne ne semble prendre en compte. Au fil du temps, les peurs restent ancrées en elle. Il y a un avant et un après l'agression.
Une autre victime vient raconter son agression. Le procédé est similaire, sans que cela ne soit pris en compte. Peu importe le policier qui se trouve face à une des victimes, ils démontrent tous une incapacité à accueillir leurs paroles. Pire, au-delà des préjugés racistes “l’agresseur avait un accent, genre arabe?”, il y a ces gestes, comme de mimer une fellation dans le dos de la victime.
Certaines des victimes ressentent un besoin de reconnaissance, d'autres de vengeance ou sont dans le déni. L'une d'elles dira très justement “Qu'est-ce qu'il a fait de moi?”, signifiant l'impact de cette agression sur sa vie.
Rapidement, on connaît l'identité de l'agresseur (Jonathan Turnbull). Sa normalité est effrayante. Il participe à la vie de la communauté. Un monsieur tout le monde, inséré et actif au sein de la société. Un profil qui ne colle pas à celui d’un tueur en série type, ce qui lui permet de er entre les mailles d’un filet poreux, à cause de l’incompétence de la police.
Sur les 54 viols et tentatives de viols, combien auraient pu ne pas avoir lieu. Bien sûr, il est plus facile de juger, surtout avec le recul, mais quand on voit les divers éléments, on peut légitimement se poser la question et remettre en cause les sé(r)vices de la police. Une police qui est une institution raciste et misogyne. Dans ce contexte, les femmes ne sont ni écoutées, ni ne se sentent en sécurité face à eux.
On assiste impuissant aux dysfonctionnements de la machine judiciaire avec une juge (Pauline Parigot) qui se retrouve confrontée, comme les victimes, à la condescendance et misogynie de la police. Les hommes ne cessent de minimiser les agressions et de dire qu'elles ont eu de la chance. Les victimes sont prises dans un mécanisme infernal qui ne prend pas en compte leurs soufs et leur fait revivre sans cesse les violences. Elles sont abandonnées à leur sort, sans nouvelles de l'enquête, seules face à elles-mêmes.
Elles doivent composer avec un sentiment de honte, ainsi que gérer l’impuissance de leurs maris face à une situation qui les dée, sans prendre le temps de les comprendre, en rejetant la faute du délitement du couple sur leurs femmes.
La série n'omet pas de poser le contexte social et économique d'une ville impactée par la fermeture de l'usine, de la précarité qui en découle et de ses conséquences sur ses femmes, les familles et toute une population qui se retrouvent aux abois. Les faits divers ont aussi comme conséquence, de rebuter d'éventuels investisseurs, s’inquiétant de l’implication de la mairesse (Noémie Lvovsky) qui a le courage de mettre en lumière ces drames et de bousculer une police amorphe. Un effet boule de neige qui accentue les difficultés financières et psychologiques de ses victimes comme de ses habitants.
Alice Giraud et Marc Herpoux font un travail remarquable en termes d’écriture pour nous permettre de s'immerger dans cet effroyable fait divers, ainsi que la réalisation de Jean-Xavier Lestrade. A noter la présence d’Olivier Gourmet, qui donne une ampleur cinématographique à une œuvre qui va au-delà du simple cadre télévisuel.
Sambre est une série essentielle, d'une grande richesse thématique, en abordant les différents aspects des conséquences de la violence des agressions sexuelles, ainsi que son contexte. Elle fait froid dans le dos et pousse à la réflexion sur les diverses institutions qui sont censées protéger ses femmes, ainsi que l’ensemble de la population.