Une série française. Sur L’Europe.
Apparemment, deux bonnes raisons de fuir.
La première se e de commentaires : je m'attendais aux éternels dialogues plats, aux (même) , a l'absence d'enjeux, aux lieux communs recyclés, etc..etc...
Pour la seconde, on pouvait craindre un parti pris caricatural, d'un coté ou de l'autre.
Et donc, j'ai cliqué sur play, prés à abandonner au bout de 5 minutes. Parce que que bon, quand même une série sur l’Europe, ça a de quoi attiser la curiosité. Peut être pour voir jusqu’où irait le massacre.
Et j'ai enfilé la moitié des épisodes d'un seul coup de minuit à 2h30 du matin, en suivant les tribulations de l'ingénu de service, jeune assistant parlementaire attaché a un député incompétent, plongeant tête baissée dans les méandres de la politique européenne, dont on découvre peu a peu les mécanismes complexes.
Sur le fond : on voit rapidement qu'il y en a justement, derrière le masque grimaçant de la comédie. Tout sauf manichéen, la série pointe la complexité non seulement du projet européen, mais au delà, de la démocratie (parlementaire) tout court, dont elle apparaît finalement être le parangon. De même que House of Cards n'a pas été écrite par des redneck complotistes pour diaboliser les institutions fédérales américaines, de même, Parlement n'est certainement pas "anti-européen".
Et c'est la qu'est la grande classe.
Comme (et plus explicitement encore) que l'incontournable Auberge Espagnole avant lui, il met en avant ce gros bordel aussi improbable et fragile que précieux que sont les institutions.
Sur la forme, il le fait en évitant le didactisme, en empruntant un peu a l'acidité des comédies anglaises, ce qui est rare. Et qui n’empêche pas de viser juste. Comme le dit l'assistant parlementaire allemand au protagoniste : "l’Europe, c'est les allemands qui donnent de l'argent a tout le monde pour être leur copains". Cinglante formule, mais qui résume bien des choses historiquement, jusqu'à aujourd'hui. Tous les personnages parviennent à être savoureux et à "porter" une part du discours sur la politique (et le projet européen) avec toutes ses béquilles (l'éuphémisation, la labyrinthe des négociation, etc...). On sent que l'ensemble est très documenté.
D'ailleurs, le propos n'est pas binaire et sort du caricatural pro ou contre l’Europe. Dans parlement, il s'agit surtout de politiques, donc au moins autant de choix qui déent largement un affrontement entre intérêts nationaux. Dès le début, on indique au stagiaire comment reconnaître à leur accoutrement la droite conservatrice, la gauche communiste "et ses costumes RDA", etc... même les "anti" sont campés dans leur diversité, depuis les anti-brexit (dont on pointe bien les contradictions, lorsque le stagiaire convaincs la député pro-brexit de voter pour un amendement écolo...qui profitera au RU qui n'aura pas à l'appliquer), jusqu'au parti crypto-nazi scandinave au joli minois (en la personne de la copine du protagoniste).
Ma seule réserve ? Peut être, justement, que le coté transnational des intérêts n'est pas assez mis en avant. Et encore...
Maintenant, reste à savoir pourquoi cette série a échappé aux innombrables ratages. Mon hypothèse: elle échappe à l'attraction de la planète de part sa nature. Seuls deux acteurs sont français. D'autres langues y sont parlées. Çà ne se e pas à Marseille. Pas de femme flic ou d'assistante sociale. Ni de Brocanteur. Pas de tentation du copier coller de la formule US "cool" , ni d’esbroufe visuelle. Au contraire, un fond solide se prêtant aux intrigues, un univers à la fois proche et lointain.
Le fait que que sortir du bouillon de culture franco-français a réussi à cette série. Une leçon à en tirer pour la fiction télévisuelle française...et européenne ?