On n'est jamais vraiment déçu avec Michel Bussi, l'un des romanciers "de gare" les plus constants et les plus inspirés, qui aime choisir des titres issus de paroles de chansons françaises.
Ici, "On la trouvait plutôt jolie" fait allusion au morceau "Lili" de Pierre Perret, qui dénonçait déjà le sort des migrants, thème central du roman de Bussi, un sujet brûlant au cœur de l'actualité.
La quatrième de couverture annonce "un roman humaniste", et le terme n'est pas mensonger, puisqu'à travers son récit teinté de mystère et suspense, Bussi souhaite surtout évoquer la situation des migrants africains dans le monde actuel.
Le parcours de son héroïne malienne Leyli, et celui de ses trois enfants, permet au romancier français de mettre en lumière l'injustice fondamentale subie par ces populations qui ont eu le simple tort de naître du mauvais côté de la Méditerranée, illustrée par plusieurs cas individuels, de chaque côté du continent, parmi les familles, les eurs, et les divers complices plus ou moins directs d'un système bien rôdé.
A une époque où les gilets jaunes réclament (à juste titre) moins d'inégalités sociales, on voit bien que la notion d'injustice n'interpelle vraiment que d'un seul coté de la frontière.
Bussi en profite également pour tordre le cou à certaines idées reçues, comme celle qui voudrait que ce soient les populations les plus pauvres qui seraient candidates au age en Europe, alors qu'au contraire ces dernières sont souvent attachées à leur terre natale, et n'ont pas les moyens de ces familles plus "aisées" qui s'endettent sur plusieurs générations pour permettre à l'un d'entre eux de tenter le grand voyage.
L'écrivain normand nous rappelle également à quel point les états européens ne sont pas si fâchés de la présence de clandestins, autant de citoyens au rabais s'acquittant de leurs devoirs (cotisations, consommation, travaux pénibles…) sans bénéficier d'aucun droit en retour.
Les belles idées ne font pas toujours les bons romans, mais ce propos engagé offre à celui-ci une épaisseur et une profondeur appréciables, d'autant que l'intrigue "policière" reste assez captivante.
Bussi nous offre en effet un twist final dont il a le secret, même si ces lecteurs fidèles pourront reconnaître un dispositif narratif assez proche de "Nymphéas noirs", l'un de ses premiers grands succès.
On pourra en outre reprocher à "On la trouvait plutôt jolie" un dénouement un peu longuet, et surtout un (relatif) happy end en décalage avec la tonalité générale grave voire désabusée.
Ce dixième roman de Michel Bussi reste néanmoins une lecture tout à fait recommandable.