L’exercice du silence. C’est la poursuite de l’acceptation du bruit infini du monde. Les choses : quelles choses ? Tout est là, tout est donné, rien ne s’achève. Nous cherchons le monde comme un absent. Nous sommes des somnambules privés de rêves errant dans quelque espace dont on ne sait que dire, qu’il faut apprendre que faire, avec cette question extrême en filigrane de la vie quotidienne : comment vivre ? À force de mots on ne sait plus sentir, et dans un mouvement infini la sensation des choses échappe au langage. C’est qu’on ne peut pas avoir les mots. Il n’y a que des tentatives. On regarde la flamme d’une bougie, fasciné, on approche les deux mains pour en saisir quelque chaleur en partage, on ne peut toucher ou c’est une brûlure fugace et absente car : quel mystère que le feu brûle ? La vision est un leurre cependant elle aussi existe. Hors du silence, dans le silence, c’est une même route alinéaire striée de pierres “hors de l’acte de connaître et de nommer, dont la densité chasse le monde”. On amasse ces pierres comme des remparts au doute, on chante notre pas, mais c’est une étrange musique. Puisque la vie n’entend pas les mots qu’on lui propose, puisqu’indifférente elle “ne s’occupe que de vivre”, ne reste qu’à s’approprier les vagues : les rendre bonnes pour nous-mêmes et “Voir ce qui ret, voir le presque.” Construisez votre silence.