En vieillissant les hommes pleurent se déroule sur une seule journée. En juillet 1961. En un lieu unique : la maison d'Albert, ouvrier chez Michelin, près de Clermont-Ferrand. Le héros du roman de Jean-Luc Seigle, qui a fait la guerre sur la ligne Maginot et a été fait prisonnier, n'a jamais raconté ses souvenirs. Il n'en peut plus, Albert, il survit plus qu'il ne vit. Le monde est devenu moderne, la télévision, le remembrement, la guerre d'Algérie où son fils aîné combat, tout lui rappelle qu'il n'y a plus sa place. Sa femme rajeunit, sa mère s'enfonce dans les ténèbres, son jeune fils découvre Balzac. Ils pourront faire sans lui. Avec pudeur et un amour profond de ses personnages, Seigle raconte la douleur intime d'un homme qui n'a plus la force de continuer. Dans un style limpide, avec un souci du détail matériel et psychologique qui ne sont jamais pesants. Au age, dans une sorte de post-face à la fiction, l'auteur réhabilite la ligne Maginot, si souvent moquée, et ses combattants qui repoussèrent les allemands en 40, pour rien, parce que l'Histoire n'a retenu que la débâcle sur l'autre front, le vrai, selon les manuels. Dans ce livre, la colère est enveloppée dans une torpeur estivale, la chaleur accablant les corps et exacerbant les états d'âme. Une belle oeuvre sur la mémoire, l'oubli, les remords, le progrès et la transmission. Oui, avant tout, la transmission.