Le style de Graham Swift, tout en arabesques, fait merveille dans ses romans, Le dimanche des mères, par exemple, s'il fallait n'en citer qu'un. Mais l'auteur anglais est-il aussi à l'aise dans le format court, genre qu'il a moins pratiqué ? Les nouvelles qui composent Douze histoires d'après-guerre sont certes un peu inégales mais on y retrouve sa manière d'appréhender un récit, qui ne va jamais directement au cœur de son sujet et entretient souvent un certain flou, avec beaucoup d'introspection et une série de questionnements à la clé. Mais ces miniatures ont au moins un point commun, elles surgissent de la mémoire de personnages plutôt ordinaires aux prises avec l'histoire en marche, que cela soit la deuxième guerre mondiale, principalement ou encore la crise des missiles de Cuba, pour l'une des nouvelles, la plus amusante. Leur étoffe est humaine, assurément, avec des parcours de vie cabossés, des prises de décision difficiles ou des deuils à surmonter. Swift n'a pas autant de place que dans un roman pour déployer à plein son art de la subtilité mais certains des récits sont précieux et inoubliables comme celui qui s'intitule Noir (11 des 12 nouvelles comportent un titre avec un seul mot). Dans celui-ci, une jeune femme, pendant la guerre, ose un geste fou, celui de s'asseoir au côté d'un soldat américain de couleur, dans un bus. Et pourquoi agit-elle ainsi ? La réponse se trouve dans sa vie personnelle et ne peut que susciter étonnement, ravissement et surtout émotion.