The Last Guardian
7.3
The Last Guardian

Jeu de Sony Interactive Entertainment (2016PlayStation 4)

Un chef-d'œuvre complètement pété.

Fumito Ueda, je lui pardonne tout à ce mec.


Surtout que là j’ai poireauté dix ans avant de pouvoir poser mes mains sur son petit dernier. Y a vraiment QUE LUI qui peut réussir à me faire jouer à un jeu à base d’énigmes relou, fini au pipi de chameau. Alors ouais je suis bien conscient qu’il y a plein de trucs qui vont pas. C’est un jeu-PS3-plus-plus qui porte les stigmates de son interminable gestation : les actions contextuelles sont brouillonnes, les collisions un peu foireuses, la caméra ne sait jamais où se foutre et devient totalement folle dès qu’on se retrouve coincé dans un intérieur exigu… Mais ça c’est pas forcément nouveau dans le Ueda-game. Plus emmerdant, le jeu ne fait au final rien de très intéressant. C’est une sorte d’ICO où les rôles ont été inversés. La plupart du temps tu vas te demander OÙ EST-CE QUE JE SUIS CENSÉ ALLER PUTAIN ? et tu vas te prendre plus ou moins la tête à essayer de trouver un age vers la prochaine zone. Les puzzles sont globalement simplets, comparés à ceux d’ICO — ou alors c’est moi qui suis devenu plus intelligent —, et surtout, on est un cran en-dessous de l’ambition délirante et des audaces conceptuelles de Shadow of the Colossus.


Ça, c’était pour les choses qui fâchent.


On trouvera toujours quelques connards ricaneurs pour te rétorquer que le jeu cache sa misère vidéoludique derrière un chantage affectif permanent. Et… ouais, c’est pas entièrement faux. C’est un peu la marque de fabrique de Ueda, en même temps. T’auras beau nous dire que nonon t’es pas en train de pleurer comme une première communiante en pleine poussée d’hormones, qu’en fait t’as une particule fine dans l’œil, mais tu pourras pas nier qu’il y a vraiment du génie derrière cette grosse mécanique à produire de la chiale. Soyons clair, l’animation de la bestiole est juste INCROYABLE, à mi-chemin entre le gentil toutou bien soumis et le chat aka la master race. Difficile de pas fondre quand elle te regarde avec ses grands yeux noirs humides ou quand elle hurle de désespoir dès que tu commences à t’éloigner. Impossible de ne pas être fasciné par cette manière si délicate de mettre en scène la relation de confiance qui s’installe entre le gamin et cette merveilleuse créature, de ne pas avoir le bide qui se retourne dès que tu sens que son existence est menacée ou que son agressivité se retourne contre toi… C’est bien simple j’ai é les trois quarts du jeu à me promettre de ne plus jamais manger d'animal, de devenir vegan et de bouffer du tofu jusqu’à mon dernier souffle. Sauf quand la bête refusait de faire ce que j’attendais d’elle, sans que je sache trop bien si c’était une volonté des développeurs pour la rendre plus réaliste dans son comportement ou si c’était juste programmé avec les pieds. Dans ces moments-là j’aurais pu bouffer un bon demi-kilo de steak tartare.


Alors c’est vrai, deux ou trois fois j’ai eu envie de balancer la manette contre le mur, surtout à la fin, quand le jeu devient forcément un poilou plus difficile tout en poussant la charge émotionnelle à son paroxysme, ce qui est vraiment pas cool quand t’es un petit babtou fragile comme moi. J’ai cru que ces petites contrariétés finiraient par prendre le dessus et me gâcher définitivement tout le potentiel dramatique du jeu. Évidemment, j’étais à côté de la plaque. C’est toujours aussi fascinant de voir Ueda construire au fil de ses jeux un univers où rien n’est jamais vraiment expliqué mais où tu sens quand même le poids de l’histoire derrière chaque ruine, cre les mêmes bases esthétiques (cette magnifique lumière de fin d’après-midi d’été, l’alternance entre surex et sous-exposition, le gigantisme, cette obsession bizarre pour les cornes), les mêmes thématiques (malédiction, transgression, empathie), comme une sorte de Tolkien minimal-techno. Je vais pas te mentir, s’investir dans ce jeu boiteux et pas toujours friendly représente une forme de sacerdoce. C’est une expérience non-formatée, qui se mérite, et dont tu ne retiendras pas forcément grand chose en terme de gameplay. Mais c'est une aventure qui va te hanter pendant un bon moment.

8
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le 12 févr. 2017

Critique lue 712 fois

7 j'aime

L'Ami Ricofruit

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