Divertir, am et fédérer : trois règles d'or qu'un film d'animation doit suivre s'il veut se faire une place confortable dans l'inconscient collectif des 7 à 77 ans. Daté de 1982, The Plague Dogs ne cherche pas sciemment à tourner le dos à ces préceptes, il les ignore simplement.
Narrant l'histoire de deux chiens perdus en rase campagne après s'être échappés d'un labo d'expérimentation à l'éthique douteuse, The Plague Dogs est le film de toutes les injustices : humaines, morales et sociales.
Humaines car l'empathie immédiate que l'on ressent envers les animaux est décuplée par un sentiment aussi douloureux qu'anti-commercial : l'impuissance face à ce qui leur arrive.
Morales ensuite car, 82mn durant, il s'agit de suivre un duo de canidés livrés en pâture à des humains auxquels il est impossible de s'identifier ; condamnant leurs actions, ils nous renvoient un reflet peu glorieux de la mainmise des nos congénères sur le reste de la chaîne alimentaire.
Sociales, enfin, grâce au propos global du long métrage, les aspects humains et moraux provoquant une émotion qui élève le débat au point d'affecter notre responsabilité propre sur cette mainmise.
Hanté par le silence, The Plague Dogs n'est pas une promenade de santé. Sûr de lui, le récit écarte tout ce qui pourrait lui permettre d'être accueilli à bras ouverts par le public familial. Attaché à un réalisme sec que même l'anthropomorphisme des héros ne vient pas adoucir, The Plague Dogs tape là où ça fait mal. Loin d'accumuler les séquences de cruauté animale, le réalisateur Martin Rosen les réduit au contraire au minimum. Ayant posé son contexte, il fait craindre au public chaque nouvelle rencontre entre les deux évadés et les humains lancés à leur recherche. Peu à peu, il construit ainsi un suspense dont le rythme alangui pèse comme une chape de plomb jusqu'à une conclusion bouleversante, à mi-chemin entre la promesse de lendemains meilleurs et la peur panique d'une mort cruelle, sans personne pour y assister hormis la poignée de spectateurs qui aura fait le voyage.
Balade désespérée dans un simili no man's land cadré à hauteur de deux animaux seuls au monde, The Plague Dogs est un petit chef-d'oeuvre d'émotion brute qui mérite vraiment d'être découvert.