Je doute. Cela va faire une demie-heure que j'ai vu Pocahontas et je doute. Je doute de ma note, de la portée du film, de son message écolo, de la profondeur (artificielle ?) des personnages. Je suis désemparé, je ne sais pas quoi penser, mais je vais tant bien que mal essayer de clarifier mon point de vue.
Pocahontas fait partie de ces films que je qualifierais maladroitement de "tiraillement" : on a envie de crier au génie, mais la mièvrerie par trop présente désempare. Pourquoi crier au génie ? Mettez-vous à la place de l'américain lambda qui va regarder ce film, éduqué (insidieusement) à la sauce impérialiste depuis toujours : d'un seul coup, vous n'êtes plus le sauveur de la planète, le gendarme du monde, vous êtes le destructeur, le spoliateur de terres et de richesses. Alors immédiatement on crie au génie, enfin un film américain réaliste sur son histoire, pour une première fois (à aborder l'histoire américaine), Disney n'y va pas avec le dos de la louche ! Mais... ensuite vous réalisez que ce ne sont aucunement les américains qui sont mis en scène, ce sont les anglais. Radcliffe évoque les prouesses sanglantes des conquistadors espagnols, mais aucune mention des américains, et ce que l'on croyait être un mea culpa est en vérité une manière bien convenue d'aborder l'histoire : nous, peuple américain, n'existons pas encore, ce n'est pas nous qui avons massacré les sauv... les autochtones les premiers... les (vilains) anglais l'ont fait avant !
Alors on se dit qu'on se fout de nous, qu'on joue avec le spectateur, qu'on... et puis le message, simple et efficace du respect de la nature, beau et sans effet de manche, mais qui sombre rapidement, trop rapidement dans la mièvrerie écolo sans intérêt.
Et on continue, frustré d'un tel gâchis apparent, finalement, c'est pas terrible comme film et puis franchement les musiques sont nulles... Et là, tout à coup, surgit L'Air du vent au détour d'une rivière : la chanson vous compresse le plexus, vidant littéralement vos poumons. Incapable de respirer, hébété par la fulgurance de l'attaque, vous retenez difficilement un pincement au cœur. Vous reprenez vos esprits pour réaliser que vous venez d'entendre une des plus belles chansons du studio, rien que ça. L'aventure chaotique et sporadique continue, sinueuse ; vient alors la chanson Des sauvages : "Puisqu'ils ne sont pas blancs, ils sont forcément méchants" ; "Détruisons cette race, qu'il n'en reste aucune trace" et autres joyeusetés. Vous vous dites que c'est abjecte, idiot, franchement répugnant... au moment où la tribu Powhatan reprend l'air, avec les mêmes paroles. C'est simple, mais efficace, donnant lieu à un des plus beaux plans du film : celui de l'entrelacement des fumées de guerre des deux camps, pétri de couleurs vives puis sombres, montrant la colère et la mort à venir.
Désemparé, vous ne savez plus quelle bourde critiquer, quelle image encenser. Vous réalisez que, après tout, malgré tous les défauts, le film est quand même vraiment bon. Mais c'était sans compter sur la fin, qui sombre de plus belle et encore plus profondément dans la mignardise dégoulinante à fleurs bleues, et jaune et mauve et pourpre. Vous commencez sérieusement à vous énerver lorsque vous réalisez qu'il n'y a pas le happy ending habituel : le prince et la princesse sont séparé, l'un blessé (à mort ?) avec un avenir plus qu'incertain, l'autre le cœur amoureux transi mais déchiré de voir partir l'être aimé.
THE END
Complètement éberlué, je reprends doucement mes esprits. Il ne peut pas être bien ce film, y a même pas un vrai méchant ! Il est tout pourri Radcliffe, il sent la naphtaline et le thé noir ! Non ! Je n'veux pas, je n'peux pas aimer un Disney où y a pas de méchant, c'est pas possible ! Oh et puis merde...