Imposture a la plancha !

Nous sommes à Flossenbürg, en Allemagne,

l 'hiver 1999. Un petit monsieur chauve, moustachu et bedonnant s'approche du responsable des archives et lui réclame un certificat prouvant qu'il a bien été déporté dans cet ancien camp de concentration. Il arrive de Barcelone. Il a même porté de la boutifarre, (boudin catalan, apprécié des amateurs 😉). Mais il ne se souvient plus de son matricule et son nom n'est pas répertorié. Le doute s'installe alors et même sa femme l'interroge : "tu es sûr que ça s'est bien é comme ça ?"

Et pourtant le temps presse. Une cérémonie va être organisée en hommage aux victimes du camp de Mauthausen, en présence du Premier ministre Zapatero et Enric Marco doit y prendre la parole comme président de l'Association nationale des déportés espagnols, justement.

Un historien opiniâtre finit par le démasquer.

Il est en fait parti comme travailleur volontaire pendant la guerre...

Le monde s'écroule alors pour lui. Il est banni de l'association. Sa femme est pétrifiée.

Et sa fille, hors d'elle, lui demande un jour : "que raconteras-tu à ton petit-fils ?"

"La vérité", lui répond-il, mi sérieux mi penaud. Car ce monsieur, ex mécanicien , a réellement existé et, pendant des décennies, il a donné des conférences, organisé des débats dans les écoles, a été célébré à la télé comme un héros.

Ce film, Marco l'énigme d'une vie, raconte cette fascinante imposture et nous interroge aussi. Pourquoi a-t-elle duré aussi longtemps, pendant tout le franquisme, complice des nazis?

Car après la révélation, et jusqu'à sa mort à 102 ans , il continuera à expliquer que sans lui, on n' aurait rien su de tout ce que ses compatriotes ont enduré dans ce camp où "ils ont été les premiers à entrer et les derniers à en sortir". Après tout, au-delà de la nécessaire recherche, sinon d'une "vérité historique", au moins d'une honnêteté des faits, peut on lui en vouloir ?

Et puis, s'il y a des gens qui ont un besoin pathologique d'exister, comment reprocher à chacun de romancer un peu sa propre vie, comme pour la rendre peut-être plus riche ou plus légère, voire plus vivable, tout simplement. Le débat est ouvert.

Le comédien Eduard Fernàndez, bien plus beau dans la vie, est époustouflant.

Le sujet a donné un livre de l'excellent romancier catalan Javier Cercas, L' imposteur.


Alors vive le cinémâââ, toujours et la boutifarre grillée à la plancha, avec aïoli , pa amb tomàquet, le tout arrosé d' un Côtes du Roussillon bien frais 🥂

8
Écrit par

Créée

il y a 4 jours

Critique lue 3 fois

Vive-le-cinemaaa

Écrit par

Critique lue 3 fois

D'autres avis sur Marco, l’énigme d’une vie

Quel est le plus horrible, la vérité nue ou le mensonge ?

Après avoir revu Volver d'Almodovar la veille, me voilà au sortir de Marco. Par un heureux hasard, le thème central des deux films est le mensonge, ce qui amène une mise en perspective originale...

Par

il y a 6 jours

2 j'aime

Un faussaire "sincère"

A travers l’histoire vraie d’Enric Marco (1921-2022), qui s’est fait er, pendant des années, pour un déporté au camp bavarois de Flossenbürg, et a porté le combat de faire reconnaitre à l’état...

Par

le 31 mars 2025

2 j'aime

Du même critique

Brillantissime, I say !?

" Il y a une taupe dans la maison !", annonce d'emblée le chef des services secrets britanniques (Pierce Brosnan, ex James Bond, reconverti en patron rougeot et colérique.)Diable, l'affaire est...

le 16 mars 2025

2 j'aime

Dieu laverait-il plus blanc?

Le film Tu ne mentiras point (Plus subtil que son titre le laisse paraître) de Tim Mielants, rend hommage aux 56 000 femmes, victimes de violence et sévices pendant plus de 70 ans dans des couvents ...

le 7 mai 2025

1 j'aime