J’ai un peu découvert ce film par hasard, en le croisant sur le catalogue Netflix. Le titre ne me disait rien mais le casting et les bonnes notes sur SensCritique m’ont convaincue de lui donner sa chance, malgré sa longueur. Le film est solide, bien construit… mais je comprends aussi pourquoi il n’a peut-être pas marqué durablement les mémoires.
L’histoire repose sur un postulat assez classique : le temps d’un week-end, un jeune étudiant boursier et complexé de l’être, naïf, isolé, est chargé de s’occuper d’un colonel aveugle, ancien militaire, retraité contre son gré, et d’une antipathie olympique. Ce qui devait être un « babysitting » facile devient évidemment un voyage initiatique, autant pour l’un que pour l’autre. En parallèle, Charlie est pris dans une affaire disciplinaire à l’école : soit il dénonce des camarades riches qui ont fait une belle connerie, soit il se tait… et risque de tout perdre, lui qui n’a ni argent ni appuis. Le film repose quasi exclusivement sur le face-à-face entre Chris O’Donnell et Al Pacino. Et si le second cabotine comme à son habitude, le premier peine à exister face à lui. Il faut dire que Pacino, ici, incarne un personnage aussi flamboyant qu’ambigu : aigri, misogyne, brutal, et on comprend vite qu’il n’a pas attendu son handicap pour devenir comme ça. Il y a de l’humanité dans sa relation avec Charlie, mais on peut aussi se demander s’il ne l’utilise pas, s’il ne se sert pas de lui pour retrouver, l’espace d’un instant, une forme d’éclat.
Le film a clairement vieilli, notamment dans sa représentation des rapports sociaux, et surtout dans son final. Cette scène de plaidoyer ultra-américaine, face à un directeur intransigeant et une salle de jeunes hommes ébahis qui se lèvent pour applaudir le héros intègre et en quelque sorte réhabilité un connard et machiste fini… non, vraiment, ça ne e plus. On est très loin du désenchantement contemporain. Aujourd’hui, Charlie perdrait, c’est tout. Et ce genre de morale à l’ancienne, où tout s’aligne dans un grand moment d’unité virile et méritante, a franchement pris un coup de vieux.
Le film garde quelques bons points, comme la mise en scène de la rencontre et de la découverte bien amené de la cécité de Slade, la scène de tango ou bien sûr la confrontation entre lui et Charlie à l’hôtel, entre menace armé et pleurs. Mais ça reste un film convenu, dont la morale et les représentations ont vraiment du mal à er l’épreuve du temps.