Le Comte n'est pas bon !
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le 1 juil. 2024
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Qu’il est difficile de er sous silence la somptuosité des décors et des costumes de ce Comte de Monte-Cristo cuvée 2024. Tout y respire l’opulence, une férocité d’élégance que l’on croirait échappée d’un tableau romantique. Et il faut bien le dire : Pierre Niney se glisse dans la peau d’Edmond Dantès avec une habileté qui frôle la dévotion. On le savait acteur de talent, et il le prouve ici par un jeu racé, parfois même émouvant, qui s’accorde à merveille avec la froideur désenchantée de son personnage.
Mais hélas, sous ce faste calculé, se cache une trahison si magistrale qu’elle en devient risible. Adapter Le Comte de Monte-Cristo en un film de trois heures, c’est déjà choisir la hache plutôt que le ciseau. Mais ici, ce n’est même pas de raccourcis qu’il s’agit ; c’est d’une réécriture déguisée, d’un parricide artistique sous couvert d’hommage.
Les modifications apportées à l’intrigue ne sont pas de simples libertés narratives – elles relèvent d’une prétention maladroite à vouloir moderniser un chef-d’œuvre en le dénaturant. Angèle, ce personnage inventé de toutes pièces, ressemble davantage à une tentative désespérée d’instiller de la nouveauté là où elle n’a jamais été requise. Dumas savait être complexe ; il savait tisser un réseau d’intrigues, de caractères entremêlés avec une précision de marionnettiste. Ici, on coupe les fils pour les rattacher n’importe comment.
Là où la série avec Depardieu prenait au moins le soin de respecter l’ampleur et la profondeur de l’œuvre, ce film préfère tout réduire, simplifier, tailler dans le vif jusqu’à l’absurde. Les personnages secondaires ? Disparus, ou relégués à de vulgaires silhouettes. Les subtilités de la vengeance ? Ravalées au rang d’un drame familial qui manque cruellement de saveur.
Le problème n’est pas seulement celui de l’infidélité au texte, mais celui de l’indifférence affichée vis-à-vis de l’œuvre elle-même. C’est comme si l’on avait préféré nous offrir un tableau léché, un caprice visuel, plutôt qu’un récit ambitieux et complexe. Un acte de vanité cinématographique, en somme, où l’on se gargarise de sa propre audace sans se soucier de ce que l’on détruit.
Pierre Niney, dans son costume impeccable, nous rappelle malgré tout ce qu’il aurait pu accomplir avec un véritable respect du texte. On devine chez lui cette intelligence aiguë, cette capacité à distiller la douleur et l’arrogance d’Edmond Dantès avec une élégance glaciale. Mais on l’a trop bridé, trop malmené dans un récit qui semble avoir oublié l’essence même du roman : cette idée de la vengeance qui consume et qui sauve tout à la fois.
Alors oui, les costumes sont somptueux, les décors somptueusement restitués. Mais l’âme ? Elle n’y est pas. Et sans cette âme, tout ce faste n’est qu’un carnaval prétentieux qui s’épuise de lui-même.
Créée
le 30 mars 2025
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