Nous ne présentons plus Gotham City ni ses héros et encore moins ses antagonistes. Ah si, on me souffle dans mon oreillette que la Warner veut encore présenter Gotham City... ses héros... et ses antagonistes... Très bien. Alors faisons la connaissance de Gotham, sa poignée de riches, son peuple pauvre, son asile psychiatrique, son train, ses crises économiques, ses rats, sa Wayne Tower, ses humoristes... hein ? Et oui, Gotham City filmée par *Todd Philipps*, a son club de stand up et sa propre émission « *on ne demande qu'à en rire* ». Logique, finalement, pour un réalisateur qui excelle dans la comédie depuis 19 ans (*Road Trip, Starsky et Hutch*, la trilogie *Very Bad Trip*).
Rentrons dans le vif du sujet, en - et probablement ailleurs - le parallèle est saisissant. Les grandes villes ont toutes quelque chose de Gotham City. (Personnellement j'habite Paris, et entre les quartiers Stalingrad et Barbès à tout moment je m'attends à voir Batman débarquer !) Dans ce film, le peuple descend dans la rue, et il a troqué son gilet jaune contre un masque de clown mais le message est le même. Avec un écho pareil sur ce que nous vivons, nous pouvons nous poser la question des conséquences d'un tel film sur les esprits. Je ne suis pas partisane de la théorie reliant l'art à la violence urbaine, mais ici nous avons un film faisant l'apologie d'un terroriste. Bon ok, nous avons déjà vu et aimé avec *V pour Vendetta*, mais ici le terroriste ne possède pas de réflexion propre, il n'est pas cohérent, et il ne véhicule aucun message politique. Pire, il est atteint de maladie mentale et personne ne s'occupe de sa guérison ou de son encadrement pour qu'il ne soit un danger ni pour les autres ni pour lui. Et le peuple, aveuglé par des années de précarité économique et sociale additionnées à un sentiment d'abandon par sa classe politique, décide que cette personne, mentalement déficiente, reconnue sociopathe, meurtrier, et avec un terrible goût vestimentaire, cette personne sera leur leader, leur porte-parole. En fait ici, il représente le peuple uniquement car il a un point commun avec eux : il est pauvre. On aura tout vu, vivement les gilets jaunes représentés par Xavier Dupont de Ligonnès.
Au delà mon interrogation sur les conséquences d'une telle œuvre sur des esprits faibles et en colère, au delà du fait que nous n'avions définitivement pas besoin d'une énième origin story sur Batman, nous pouvons reconnaître au film des qualités indéniables. Une mise en scène élégante, belle et poétique pour un comédien qui n'a pas peur de se salir et d'en faire des tonnes en étant toujours dans la justesse la plus absolue. *Joaquin Phoenix* nous offre - oui nous « offre » parce qu'à ce stade de virtuosité c'est un cadeau- il nous offre un éventail d'émotions troublant, nous baladant entre sa folie, ses rêves, son humour et ses traumatismes.
Malheureusement ce film ne m'a pas transcendé comme il aurait dû. Peut-être la faute à un rythme très étiré, trop contemplatif. Des lenteurs à mon sens impardonnables quand notre vision de spectateur est associée à un cerveau différent du nôtre, et en plus un cerveau malade.
Je suis donc tiraillée entre ses qualités et mon ennui, alors si vous attendez un conseil de ma part, ce sera tout simplement un ***Joker***.