Les Hors-la-loi - Fairy Quest, tome 1 par Antoine Boudet
Le concept et l'un des intérêts de Fairy Quest est de jouer avec les connaissances et les repères du lecteurs. Un petit peu à l'instar de Fables, l'histoire reprend plusieurs personnages de contes, qui reproduisent chaque jour une même histoire, dont ils se lassent au fil du temps. Ainsi, à partir de personnages que l'on connait, Paul Jenkins va prendre un angle diffèrent pour modeler ses personnages à son grès afin de raconter son histoire, tout en respectant les bases posés par Grimm. Tiens, en parlant de lui, le personnage est le tyran de ce monde, forçant les gens à refaire le même scénario. La métaphore autours de sa présence est évidente mais rigolote et assez intelligente.
Le scénariste arrive, avec une aisance déconcertante, à nous faire rentrer dans ce monde dont l'on croit connaitre les codes et dont on va découvrir une tout autre vérité. En nous faisant baigner dans un monde que l'on croit connaitre, Jenkins se joue du lecteur en changeant tel ou tel aspect des contes originels pour créer le décalage. Une sorte d'analyse de ce genre de compte, assez superficiel, mais plutôt intelligente et ludique.
Si l'écriture de Jenkins est assez maligne, elle ne repose pas uniquement sur les acquis du lecteur, mais aussi sur la structure du tome et son rythme. En effet, si le scénariste puise des comptes déjà existants, il se créer le sien en reprenant une structure très classique, mais qui a fait ses preuves, en dosant parfaitement l'action et les dialogues, magnifiquement écrits donnant des échanges savoureux entre différents personnages. Tout le talent de Paul Jenkins ici est d'à la fois écrire une œuvre intelligente, qui joue avec ce dont elle s'inspire, dont un lecteur attentif captera toutes les subtilités, ainsi que le début d'une vraie aventure, assez épique sans être complètement renversante, plaisant à la fois aux petits et aux grands.
Le scénario de Jenkins est tout ce qu'il y a de plus efficace, mais la plus grande force de Fairy Quest est sa partie graphique, d'un Humberto Ramos au top de sa forme. L'artiste mexicain, qui n'a plus besoin de prouver son talent, l'ayant déjà fait avec ses épisodes de X-Men, ou de Spider-Man, qu'ils soient écrits par Jenkins ou Dan Slott, livre ici des planches parmi les plus sublimes qu'il a réalisé. L'artiste, aidé par Leonardo Olea aux dessins, re-visitent avec astuce l'imagerie que nous nous faisons des contes, permettant de mélanger plusieurs univers/conte avec cohérence. Ils offrent un univers graphique éblouissant, avec un chara-design très enfantin et innocent, qui contraste avec la situation dans laquelle ils sont enfermés, permettant une ambiance hybride, où le merveilleux côtoie le triste. Ramos joue même avec son style, entre quelques ages de pur conte et le reste de l'histoire. Son découpage est des plus fluides et agréables, offrant une cinquantaine de pages que l'on dévore très vite, et qui sont un régal pour les yeux, encore plus grâce au grand format que Glénat propose.