Tourisme japonais

À lire en complément de ma critique de Jojo’s Bizarre Adventure.

Nous sommes és de au fond des filets.


Golden Wind est un fantasme raisonné de son auteur, c’est son petit voyage à lui en Italie. Hirohiko Araki n’a jamais fait mystère de sa Empire romain n’était alors plus une question de « Comment » mais de « Quand ».


Cet arc, cette partie, se veut avant tout une transposition de Stardust Crusaders cantonnée à un périple strictement national. Il n’y a plus de sédentarisme qui tienne, les héros ont la bougeotte et vont loin : là où est l’ennemi. Et des personnages, comme de l’ennemi, il faut en parler. Il faut en parler à voix basse cependant, car ce qui va se dire ne sera pas nécessairement agréable à entendre.


De manière générale, sauf exceptions notoires parmi lesquelles on retrouvera l’ineffable Yoshikage Kira, les personnages de Jojo’s Bizarre Adventure sont assez peu élaborés pour ce qui est de la psyché et du caractère. Ce n’est pas une attaque que de l’écrire, pas même un reproche, c’est un constat. Un constat dont on pourra tempérer tout ce qu’il a de désagréable en rappelant que Hirohiko Araki est un maître de la mise en scène et, que d’un galet, il pourrait en tirer un charisme flamboyant. Pour peu développés qu’ils étaient, les personnages de Jojo’s Bizarre Adventure, dans ce qu’ils avaient à exposer, étaient toujours plaisants. La dynamique de groupe qu’on retrouvait chez les personnages principaux nous happait au point de nous donner le sentiment d’en être ; on s’y serait cru. Golden Wind a failli à retranscrire ce sentiment.


Sans être foncièrement antipathique, la petite bande de Buccellati, à laquelle se sera agrégé l’insipide Giorno, ne trouve le moyen de se valoriser en aucune circonstance ou presque. Ils ne cherchent pas même à exister en tant que groupe cohérent. Entre le monument de sérieux et de rigueur monolithique que peut être Buccellati et le tempérament de Tsundere d’Abbacchio, il se trouvera peut-être Narrancia pour nous am de sa bêtise strictement juvénile, mais si peu. Cette troupe ne lie pas ses membres entre eux car chacun gravite autour de Buccellati sans réellement se définir par rapport aux autres. Cette amitié sincère qui unissait les croisés de Jotarô ou les habitants de Morioh par de multiples liens, on ne la retrouvera pas dans les volumes présents. La synergie est ici complètement absente et laisse un grand vide ; il n’y a pas d’esprit de corps, rien que des organes indépendants les uns des autres qui ne donnent lieu à aucun être collectif.


La mort d’Abacchio, Narrancia et Buccellati vous a-t-elle autant touché que celle de Kakyoin, Avdol et Iggy ? Répondre sincèrement à cette question, c’est confirmer au moins en partie ce que j’ai écrit relativement au manque d’intérêt légitime qu’éprouvera un lecteur à suivre des personnages aussi plats. D’autant que ceux-ci ne sont que superficiellement liés les uns aux autres.


Pardon ? Il s’en trouve pour fustiger le qualificatif « insipide » accolé précédemment à Giorno ? Je peux revenir sur mes propos si vous le désirez. Mais à cet adjectif déficient, il me faudra lui en substituer un autre. Maussade, monotone, morne, fade, transparent, ou encore fadasse sont autant de candidats à même de le désigner convenablement. Nous erons outre la thèse de l’italienne séduite par Dio et relâchée dans la nature quand toutes les autres femmes sont mortes de trop s’être offertes à lui, car à l’auteur, je pardonne tout pour ce qui est des carences béantes du scénario. Mais pour un personnage principal autant dépourvu d’âme et d’existence, il n’y a aucune complaisance à avoir. Giorno est la perfection incarnée, mais sans éclat ; sans grandeur. La perfection de son stand – qui trouvera encore le moyen de se perfectionner par la suite – n’aide d’ailleirs pas à le rendre plus appréciable. J’applaudis néanmoins la maestria d’Araki pour avoir exposé Gold Experience à tant de revers et d’adversités en dépit de la puissance de son pouvoir. Il faut en avoir de la suite dans les idées pour mettre une entité invincible en position de faiblesse.


Car l’ingéniosité des stands n’est heureusement pas déficiente. Les combats sont prenants, originaux en diable, et s’agenceront pour la plupart sans une fausse note…. jusqu’à ce qu’advienne le coda… Par coda, je ne fais nullement référence au groupe qui chantait le générique de l’adaptation animée, mais à l’acte final d’un ballet. Un ballet qui, ici, s’achève sans grâce aucune dans un effondrement aussi subit qu’épouvantable.


Diavolo et King Crimson (mon groupe favori, que j’ai effectivement découvert grâce à Araki en étant plus jeune) sont effroyables, chacun dans leur registre. Il s’agit à proprement parler, du premier antagoniste principal à ne pas avoir de lien avec Dio ou Enya. Le panache s’en fait ressentir. Doppio contre Nero était un combat au sommet, je l’ets avec plaisir, mais quand les pleins pouvoirs de King Crimson s’exercent, les festivités s’annoncent hasardeuses. L’auteur lui-même ne maîtrisait alors plus du tout un pouvoir dont il était pourtant le créateur. Ceci a dut sans doute expliquer cela.

Cela ? C’est la fin catastrophique de Golden Wind. Les combats les plus impressionnants jamais observés dans les mangas, toutes catégories confondues, comptent parmi eux la quasi intégralité des affrontements finaux de Jojo’s Bizarre Adventure. Autant dire qu’après Dio et Kira, un lecteur avisé en attendait énormément de Diavolo qui, fidèle à la tradition de l’adversaire ultime, faisait usage d’un pouvoir temporel. Oh mes aïeux… personne ne s’était attendu à ça. Qui aurait pu prévoir que Giorno attraperait une flèche, ferait ensuite évoluer son stand – oui, oui, comme dans Pokémon – pour annihiler l’antagoniste principal d’une beigne seulement ? Même sur le plan de l’humour, cette seule évocation aurait fait l’effet d’une blague de mauvais goût. Et cette blague, Hirohiko Araki l’a érigée comme point culminant de Golden Wind. Cela ne s’oublie pas facilement.

Le déshonneur et les erreurs d’écriture de cette partie, rédhibitoires pour beaucoup, ne manqueront pas d’être aussitôt lavés par Stone Ocean. Golden Wind n’a pas été une parenthèse honteuse alors qu’on y aura é de bons moments malgré certains combats anecdotiques. Mais cette partie aura fait l’impression d’une distraction ; d’une ade. Araki a voulu faire un détour par l’Italie. N’avait-il pas alors fait l’erreur de construire son récit et ses personnages autour de cette seule finalité de dessiner l’Italie dans le cadre de son récit ? À cette question, nous n’aurons jamais de réponse définitive, mais nous pourrons trouver la thèse séduisante au regard des innombrables faisceaux d’indice étalés à longueur de pages et qui tendent à la corroborer.




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le 28 avr. 2023

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Josselin Bigaut

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