C'est en l'an de grâce 2007 qu'est sortie le premier album de la nouvelle série de Xavier Dorison et Matthieu Lauffray: Long John Silver. À l'époque, il avait fait grand bruit. Six ans plus tard, avec le quatrième et dernier album de la série, une conclusion sublime.
Scénario: Xavier Dorison avait déjà travaillé avec Lauffray sur le tome 1 de Prophet, avant de le laisser voler de ses propres ailes pour les albums suivants. Ce scénariste talentueux, avec cette nouvelle série, n'a pour d'autre ambition que de "rendre hommage" à R-L Stevenson, l'auteur de "L'Ile au Trésor", en creusant plus en profondeur son personnage le plus emblématique, le fameux pirate Long John Silver. La série commence donc alors que celui-ci conclut un pacte de sang avec Lady Vivian, qui veut l'engager afin de partir à l'autre bout du monde avec elle chercher Guyanacapac, la fameuse cité d'or que son mari prétend avoir trouvé dans une première expédition. Le vieux pirate va évidemment comploter une mutinerie pour avoir une plus grosse part du gâteau, ce qui n'est pas pour déplaire à un certain docteur Livesey, médecin de bord, qui semble avoir soif d'aventure. Chronologiquement, l'aventure se e après "L'Ile au Trésor", où Long John commence vraiment à se faire vieux (encore plus que dans le roman original), et est atteint de la malaria, dans un monde "où les notaires remplacent peu à peu les aventuriers". Le soin porté à l'intrigue, avec une dimension romanesque épique, aux dialogues et aux personnages peut largement propulser Xavier Dorison au rang de maître du scénario. Celui-ci l'a bien compris, puisqu'il l'enseigne dans à l'École Émile-Cohl à Lyon, en plus d'être le script doctor de nombreux films. Il a aussi très bien compris que le succès de "Long John Silver" est aussi due aux talents du dessinateur, à qui il laisse beaucoup de place pour étirer se décors dans le découpage. Un équilibre parfait.
Dessin: Franchement on a affaire ici à une véritable claque graphique, ni plus, ni moins. Des personnages à la fois détaillés, expressifs et réalistes, des décors époustouflants, une mise en couleur exceptionnel... Lauffray prend son temps (à peu près deux ans par album) mais il soigne. Designeur de film et de jeu vidéo, les ambiances de ces albums sont tellement immersives que l'ont peut presque sentir l'odeur du sang, de la sueur et le souffle des explosion dans les scènes d'action qu'il réalise. En tout point, ces magnifiques planches sont parmi les réussites de ces dernières années. Et pour prolonger le plaisir, un artbook de 250 pages (!) du dessinateur mélangeant la plupart de ses projets bd et cinéma, est disponible depuis février pour 25€ (!). Encore faudrait-il pouvoir se le procurer, sa rareté lui faisant défaut, même sur internet (!).
Pour: Après les trois premiers albums, on attendait le quatrième avec impatience, en ayant peur d'une conclusion pas à la hauteur. Il est sortie hier, et je peux d'ores et déjà vous affirmer que cela valait le coup d'attendre.
Contre: Mais pourquoi diable sortir une édition limitée de luxe de chaque album un an après leur sortie, en plus d'un intégrale des deux premiers tomes numéroté avec des dessins inédits? Toutes ces éditions donnent mal à la tête, surtout en sachant qu'une édition intégral des quatre tomes pourrait très bien sortir dans quelques mois...
Pour conclure : Avec "Long John Silver", Dorison et Lauffray réalise une des meilleurs séries de ces dernières années, un chef-d'oeuvre indispensable, aussi bien au niveau du scénario que des dessins. R-L Stevenson peut dormir tranquille: la relève est assurée.
Ma critique de "Asgard" :
http://senscritique.sitesdebloques.app/bd/Le_Serpent_Monde_Asgard_tome_2/critique/73180900
Ma critique de "Undertaker" :
http://senscritique.sitesdebloques.app/bd/Le_Mangeur_d_or_Undertaker_tome_1/critique/47225207